Attaque du Congrès, fascisme et Gilets Jaunes, message pour les Français-es

Depuis l’attaque du Congrès le mercredi 6 janvier, on a pu entendre, notamment dans les médias français et par des politicien-ne-s (centristes), pas mal d’“analyses” de la personnalités des participant-e-s de cette tentative de coup d’État.

D’après la plupart de ces personnes -qui pour la plupart n’ont pas de connaissances spécifiques de la politique américaine-, les assaillant-e-s du Capitole seraient des “Gilets Jaunes américains”.

Cette affirmation est fausse. Complètement fausse, et c’est une tentative de récupération politique honteuse au vu de la gravité de cette attaque sur l’institution la plus importante de la plus vieille démocratie du monde.

La grande majorité de celles et ceux qui s’identifient comme Gilets Jaunes gagnent moins que la moyenne nationale (sources). C’est l’impact économique désastreux de décennies de politiques néolibérales de nos gouvernements successifs qui ont conduit au soulèvement populaire à la fin de l’année 2018 dans notre pays. Les Gilets Jaunes sont des femmes et des hommes qui n’ont plus eu d’autres moyens de se faire entendre que de descendre dans la rue tous les samedis. Et même si le mouvement, en prenant de l’ampleur, s’est étendu vers d’autres revendications (par exemple le RIC, ou contre nos politicien-ne-s), la raison première de ces mobilisations est économique.

Et cela mène à un deuxième point très important : le mouvement des Gilets Jaunes ne peuvent pas être positionné sur un axe politique. Il y a trois grands groupes à distinguer (sources plus bas) : une grande partie sont des sympathisant-e-s d’extrême droite, une grande partie d’extrême gauche et une grande partie se déclarent sans affiliations partisanes, ne se reconnaissent pas en politique.

Ce sont là les deux différences majeures avec les assaillant-e-s du Capitole : leurs motivations sont idéologiques et non économiques, et ces gens là sont par nature politisé-e-s.

En effet, d’après cette étude, une partie de l’électorat Trump a certes voté pour lui par “désespoir” économique et sentiment d’abandon de la part des élites, mais c’est une partie relativement petite par rapport aux électeurs-rices qui ont voté pour lui pour des raisons idéologiques (racisme, conservationnisme, religion, armes, suprématie blanche et masculine, anti-immigration…). Et l’électorat Trump est 1/ largement politisé ; 2/ uniquement d’extrême droite (et de droite pour celles et ceux qui ont voté pour lui pour son parti, mais en aucun cas de gauche) ! On parle quand même ici de fervent-e-s partisant-e-s du Président du pays, il n’y a pas de comparaison possible avec l’anti-élitisme des Gilets Jaunes…

La troisième différence est dans la nature de la manifestation. Tou-te-s les manifestant-e-s du 6 janvier n’avaient pas pour objectif d’envahir le Capitole, mais la majorité venait quand même suite aux demandes (explicites) de Trump d’empêcher la certification des résultats de l’élection de Joe Biden. En comparaison, même si ce ne sont pas les images que nous avons vues dans les médias et sur les réseaux sociaux, l’immense majorité des Gilets Jaunes manifestaient et manifestent dans le calme. Les individus violents et les destructions qui pourraient être comparées avec l’attaque du Congrès constituent une petite minorité des manifestations.

Comparer les attaquant-e-s du Capitole avec les Gilets Jaunes est dangereux. Les Gilets Jaunes demandent d’avoir assez d’argent pour vivre. Les Trumpistes sont des suprémacistes fascistes.

Cette comparaison montre par ailleurs l’incompréhension et la condescendance des centristes et des classes supérieures à l’égard des Gilets Jaunes. Les comparer à ces terroristes n’ayant d’autres but que de détruire les preuves d’une élection ne fera que renforcer la fracture sociale de notre pays.

Enfin, on parle ici de fascisme pur. De ce contre quoi nos ancêtres ont donné leur vie. La haine, le racisme, la suprémacie blanche. Abaisser les Trumpistes au simple statut de “soutiens de Trump” serait se cacher les yeux face à la réalité de la dangerosité de ce que nous avons vu mercredi : une tentative de coup d’État fasciste. Et en n’alertant pas sur ce fait, les centristes continuent une fois de plus à donner plus de pouvoir à l’extrême-droite.

Si le fascisme revient, c’est que le centre et la droite lui auront fait la courte échelle. Avec ce genre de discours le normalisant.

PS : Pour parler d’un sujet aussi sensible, il est nécessaire de s’y connaître. Les conséquences peuvent être sérieuses, voire catastrophiques. C’est en partie à cause de cette incompréhension dans les médias du candidat Trump et de sa stratégie, souvent liée à une ridiculisation de ses électeurs et électrices qu’il a été élu.

Sources : sondages d’opinion sur les proximités partisanes des membres du mouvement des Gilets Jaunes présenté ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sondages_d'opinion_sur_le_mouvement_des_Gilets_jaunes#Proximit%C3%A9_politique)